Récolte de carottes

Posté par le 25 mai 2013 (du 16/05/2013 au 19/05/2013)
une carotte oubliée dans le champs

Ils en ont oubliée une !

Avec une adresse imprécise et de vagues indications selon lesquelles des travailleurs partiraient à sept heures jeudi matin pour aller récolter des légumes, on a passé la frontière du Victoria et on est entré dans le South Australia mercredi soir. Le ventre trop plein de fruits (c.f. article précédent) Chris et Lucie ont sauté le dîner sans regret et ont repéré le lieu du rendez-vous pour le lendemain (une auberge de jeunesse) avant d’aller garer le 4×4 pour la nuit devant des toilettes publiques ouvertes toute la nuit et équipées de prises électriques. Un vrai luxe ! Debout avant l’aurore en espérant avoir réellement un travail, ils ont eu un gros moment de doute à sept heures moins cinq en ne voyant personne devant l’auberge de jeunesse et ont téléphoné à leur contact qui, d’une voie endormie, leur a dit d’entrer dans l’auberge. Ouf… Les travailleurs y prenaient encore leur petit-déjeuner… L’un deux avait une carte avec l’itinéraire à suivre. Quand il est parti, on l’a suivi. On s’est inquiété de le voir faire le plein d’essence, rouler vite, tourner, faire demi-tour, s’arrêter, repartir… Il a tout de même fini par trouver la ferme, on a réussi à le suivre et on était à l’heure. C’était moins une quand même ! On est allé tout au bout du chemin en passant devant des pommiers, des choux, encore des pommiers… Chris et Lucie ont enfin eu la réponse qu’ils attendaient : ils allaient récolter des carottes.

Notre butin !

Notre butin !

Le nez collé à la vitre de la voiture sans me faire repérer par les fermiers, j’observais Chris et Lucie patauger dans la gadoue, se courber, s’accroupir, se relever, s’accroupir encore pour arracher les carottes à la main et sans gant. Au bout d’un moment, un des fermiers est entré dans le champs avec un tracteur. Chris et Lucie sont alors revenus sur leurs pas et ont commencé à ramasser les carottes arrachées pour les mettre dans le bac du tracteur. Toujours à la main et toujours sans gant. Ca allait vite et ils avaient un peu de mal à suivre. Quand le bac était plein, ils retournaient arracher et, quand le tracteur revenait, ils recommençaient à remplir le bac. Pendant un peu plus de deux heures, ils ont arraché des carottes et rempli des bacs. Parfois, ils faisaient les deux en même temps si le tracteur passait dans des carottes encore en terre. Là, ils avaient l’air de beaucoup souffrir. Leur premier calvaire a pris fin vers onze heure et le deuxième a aussitôt commencé : à la main en attendant qu’on leur trouve des sécateurs, ils devaient couper les tiges des carottes. Le but, c’était de les mettre dans des caisses en bois, entre des couches de pailles, pour leur faire passer deux mois en chambre froide. Elles seront replantées ensuite à côté de celles qui ont été plantées avec deux mois de décalage et qui finissent de grossir. La ferme ne s’intéresse pas aux carottes mais aux graines pour les exporter au japon. Le travail de Chris et Lucie n’avait pas l’air difficile mais, en fait, ils ont vite déchanté. Les doigts endoloris par des morceaux de carottes et du sable enfoncés sous les ongles (huit jours après, ça se voit encore !) et le dos en compote pour avoir arraché et ramassé des centaines de kilos de carottes à un rythme effréné, ils devaient encore se pencher pour atteindre le fond du bac et en sortir des carottes entremêlées et cimentées par la terre ramassée avec. Ca a été moins douloureux quand on leur a enfin fourni des gants mais le mal était fait et il leur fallait aussi supporter le froid, le vent et les averses. A la fin de la première journée, ils ont pu emporter avec eux des carottes restées dans le champs. Je me suis régalé ! Chris les a nettoyées et les a mises en rangs d’oignons pour qu’elles sèchent et qu’on puisse les conserver.

Un peu de rangement s'impose.

Un peu de rangement s’impose.

La deuxième journée a ressemblé à la première mais avec moins de pluie. Chris et Lucie ont commencé à travailler de concert : Chris sortait les carottes du bac pour Lucie, qui pouvait alors en attraper trois à la fois. L’employé australien qui les supervisait s’est amusé : «Ne reste pas trop longtemps dans le bac, Chris, ou tu va finir par devenir une carotte !» mais ils ne sont pas démontés et ont gardé leur technique. Ils ont multiplié leur efficacité par 1,5 tout en sollicitant moins leurs lombaires. Le labeur a duré jusqu’au coucher du soleil, à cinq heures, mais il restait encore deux bacs pleins. On se demandait s’il faudrait revenir samedi matin ou lundi mais la patronne a décidé de finir le travail elle-même lundi matin avec les employés australiens. Chris et Lucie, qui avaient eu la bonne idée de relancer la personne qui leur avait trouvé ce travail, ont reçu un sms encourageant : «oui, j’ai du boulot dans les pommes pour lundi, je vous en reparle demain». C’est donc le coeur léger qu’ils ont pris le chemin du retour. Samedi matin, ils ont fait la grasse matinée. Je m’ennuyais un peu pendant ce temps mais ils l’avaient bien méritée… Ils ont relancé leur contact par sms puis en laissant un message sur son répondeur en fin d’après-midi mais, le soir, on n’avait toujours pas de nouvelle du prochain boulot… La réponse est enfin arrivée dimanche matin : trois jours de cueillette de pommes dans la même ferme ! Ouf, on n’y croyait plus… Ils ont rangé la voiture (quand il pleut, le bazar s’accumule drôlement vite !) lavé leur linge, refait des courses pour les prochains jours… Bref, le weekend est passé vite et n’a pas suffit à faire disparaître les courbatures. Le baume est arrivé mercredi, avec la paye : plus de 300 AU$ chacun pour deux jours de travail ! On n’a pas encore les fiches de paye mais on se demande s’il n’y aurait pas eu quelques oublis dans les prélèvements des taxes… Quoi qu’il en soit, ces pépètes tombent à pic !

13 commentaires à Récolte de carottes

  1. FilOse, le 25/05/2013 17:44:36 +10:00

    Bonjour Saladolar dit le superviseur Sala Dollar :-)

    De mémoire comme ça, je crois que Chris adore les carottes, c’est bon pour les humains, ça donne les cuisses roses, et ça rend aimable.
    Même au sud la terre est basse, Saladolar, de tes maîtres, tu vas en faire des terriens.

    Question salaire de 603 $, tes maîtres ont omis de nous l’expliquer. Combien d’heures pour quel salaire horaire. Et comme Michelle l’a insinué, y a-t-il parité entre homme-femme ?

    Bonne cure de carottes à vous trois (au moins toi, Saladolar, tu dois en être enchanté).

    1. Saladolar, le 25/05/2013 18:04:17 +10:00

      Bonjour FilOse !
      J’aime beaucoup les carottes, Chris les adore mais c’est encore Lucie qui en mange le plus ! Moi aussi, je risque d’avoir les cuisses roses ?
      Je vais laisser Lucie répondre à tes questions sur le travail, elle en parlera mieux que moi.

    2. Lucie, le 25/05/2013 18:10:27 +10:00

      On n’a pas encore compris comment le salaire a été calculé puisqu’on n’a pas encore reçu les fiches de paye. On a simplement rempli les fiches d’heures en indiquant 8h10 de travail pour le premier jour et 8h30 pour le deuxième. Il est rare qu’on connaisse notre salaire horaire avant de travailler et on n’a pas souvent eu de contrat de travail. Là, on ne savait même pas ce qu’on allait faire avant d’arriver dans le champs.
      La parité est parfaitement respectée, que ce soit dans le salaire ou dans les tâches à effectuer. Du moins, pour tous les emplois qu’on a eus pour l’instant.
      Je sens que nos carottes ne vont pas faire long feu…

  2. FilOse, le 25/05/2013 18:14:56 +10:00

    Re,

    hou, houuuuuuuuuu à tous,,

    comme vous le voyez, je suis réactif en ce moment, vous devez savoir le pourquoi ;-)

    Je n’ai pas encore reçu mon super lot de Végémite. Lorsque vous ne me verrez plus, vous saurez le pourquoi.

    @++ à tous.

    1. Lucie, le 25/05/2013 18:20:54 +10:00

      On l’a posté il n’y a pas longtemps, un soir où on est revenu du travail assez tôt pour que la poste ne soit pas encore fermée. Ça s’est joué à quelques minutes mais on a réussi à entrer dans le bureau avant la fermeture et à donner le colis à la guichetière. On ne sait pas où il est en ce moment… Peut-être qu’il est déjà en France…

  3. Michelle, le 25/05/2013 19:26:00 +10:00

    Il a l’œil notre Saladolar, une fois il a repéré la grappe de raison oubliée, cette fois une carotte. J’espère que tu n’as rien dit, et englouti avec délice ce bon légume tout frais, direct producteur—>consommateur, y compris la fane. Un peu de verdure c’est bon aussi.
    Quand aux belles carottes si bien alignées sur la table, doucement…. Nous avons quitté un sanglier pur souche ardennais brun de poils, nous ne voulons pas retrouver un cochonou tout rose ou tout orangé. Une de temps en temps, en dessert, d’accord, mais pas d’excès.
    Tes maitres auraient un four, je t’aurais envoyé la recette du gâteau choco-carotte, c’est super bon je t’assure.
    Veille bien sur ton butin afin que walibis ou opossums ne viennent pas faire patte basse dessus.

  4. marie-Jeanne, le 25/05/2013 22:06:54 +10:00

    Toute peine mérite salaire… Avec tout le mal que vous vous êtes donné pour le ramassage de ces carottes, vous avez bien mérité un bon salaire.

  5. La Gélinotte, le 26/05/2013 00:24:25 +10:00

    Eh bien quelle cure de carottes vous allez faire, je ne suis pas sûre qu’on en récolte autant dans notre petit jardin.
    Un soufflé aux carottes hum c’est bon, s’il faut vous donner des idées de recettes pour les manger toutes sans en perdre une. Vous êtes un bout de temps sans franchir de frontière j’espère. Et pour les conserver, il vaut mieux aussi qu’il ne fasse pas trop chaud…
    BONNE CURE

  6. marie-Jeanne, le 26/05/2013 02:46:12 +10:00

    Merci à Saladolar d’avoir ajouté la date réelle de votre séjour ( qui suit la date de publication de l’article ). C’est vrai qu’en Tasmanie, c’était difficile de vous suivre : on avait toujours un temps de retard par rapport à vous. Maintenant, ce sera plus facile pour suivre votre itinéraire.

  7. La Gélinotte, le 26/05/2013 05:42:36 +10:00

    f

  8. FilOse, le 27/05/2013 04:37:48 +10:00

    Bonjour tous,

    Comme dans la fable « Le rat des champs et le rat des villes », je vois qu’il y a des commentateurs(trices) des villes.
    Petite précision sur la vie de la carotte :
    1 – la carotte est une plante bisanuelle, la première année la graine germe, ensuite la racine se forme et grossit pour emmagasiner des provisions.
    2 – la carotte, pour produire des graines, a besoin d’un arrêt végétatif, c’est le rôle du froid. Ne connaissant pas le microclimat où nos trois baroudeurs ont arraché ces carottes, pourquoi cette mise en chambre froide de celles-ci pour produire cette vernalisation ?
    —— Le froid n’est pas suffisant pour arrêter la végétation, je pense que c’est le cas ici !
    —— Pour écourter le temps entre le semis et la récolte des graines.

    J’espère, sans aucune prétention, avoir éclairé votre lanterne.

    1. La Gélinotte, le 27/05/2013 05:14:19 +10:00

      Merci FilOse pour cette leçon de chose, cette aventure va nous en apprendre… des choses

  9. Michelle, le 27/05/2013 05:20:01 +10:00

    Merci FilOse pour ce petit résumé très intéressant et instructif. Je découvre quelque chose que j’ignorais totalement. La nature est pleine de surprises.