Réponse du consul

Posté par le 29 juin 2013

Suite à la lettre que j’ai envoyée au consulat le samedi 15 juin au sujet de la réalité du travail en Australie, monsieur Éric Berti, Consul général de France à Sydney, m’a répondu. A ce moment-là, j’étais dans une partie de l’Australie non couverte par les réseaux 3G et je n’ai pas pu lire mes e-mails pendant deux semaines. Je viens seulement de retrouver un accès à Internet, je vous transmets tout de suite la réponse que j’ai reçue. Voici l’e-mail (complet et non modifié) qui m’a été envoyé le lundi 18 juin :

Chère Madame,

Je vous remercie de votre longue lettre, qui détaille de façon précise les difficultés auxquelles peuvent être confrontées un jeune titulaire d’un visa vacances-travail dans ses recherches d’emploi et ses conditions de vie en Australie.

Permettez-moi en premier lieu de préciser le contexte spécifique dans lequel j’ai été amené à évoquer la question du « french shopping » dans la lettre consulaire de mai : je revenais de Broome où j’ai assisté au début d’un procès d’un jeune français « pvtiste » accusé du meurtre d’un aborigène. Ce jeune était ivre le soir des faits et il n’a pas été en mesure de prouver son innocence. Le lendemain, j’allais rendre visite à la police de la ville qui m’a fait la description du comportement de plusieurs jeunes français que j’ai reprise dans la lettre. Ce terme de « french shopping », je l’entends depuis mon arrivée en Australie, il y a dix mois, de la part de ressortissants français venant des quatre coins de l’Australie. Les conséquences de cette réputation, sans doute excessive, peuvent être graves pour les jeunes VVT en recherche d’emploi. Je pense, au vu de votre témoignage, que vous en avez vous-même souffert, sans toujours le savoir car les Australiens vous diront rarement en face qu’ils ne vous embauchent pas parce que vous êtes française. Mon intention n’était nullement de prétendre que tous les titulaires de VVT se comportent mal. Ce n’est pas le cas et je n’ai pour ma part rencontré que des jeunes honnêtes et courageux, comme vous pouvez l’être, mais qui avaient été confrontés à ce comportement de la part d’autres jeunes ou en avaient entendu parler dans les régions qu’ils avaient visitées. Dans plusieurs cas, dont celui du jeune de Broome, j’ai également constaté les méfaits de l’alcool chez certains jeunes. Il est important que les jeunes français soient conscients de ce problème, c’est le sens de mon incise dans la lettre consulaire.

Ceci étant dit, votre lettre soulève un problème important de la vie des WHV que je n’évoque pas dans la lettre consulaire et que nous nous efforçons de traiter en liaison avec le ministère des Affaires étrangères à Paris. Il s’agit de l’information des candidats au voyage en Australie. J’ai vivement regretté la vague de reportages publiés l’hiver dernier en France sur l’Australie, présentant le pays comme un eldorado, évoquant avec romantisme des jeunes faisant le tour du pays en van, alternant des travaux dans les fermes et le tourisme, comme si la recherche d’emploi en Australie était un jeu d’enfant. Lorsque j’ai pu rencontrer de tels journalistes en Australie, je leur ai fait part des difficultés que rencontraient de nombreux jeunes dans leur recherche d’emploi dans ce pays, du fait que le marché de l’emploi se contractait et que nous atteignions un degré de saturation dans ce domaine dans un pays de 23 millions d’habitants, accueillant chaque année des dizaines de milliers de WHV, dont certains très organisés comme les Asisatiques que vous mentionnez. Les PVtistes rencontrent également des difficultés de logement, à Sydney par exemple où certains paient 200 dollars par semaine le droit de dormir dans une chambre de deux ou quatre lits. Ces informations n’ont pas été reprises dans ces émissions, sans doute pour une part par peur de ternir la réputation de l’Australie et de briser le rêve australien. Nous arrivons aujourd’hui dans une situation où de plus en plus de jeunes sont confrontés aux difficultés que vous citez et, comme je l’indiquais dans l’interview à SBS, certains se livrent au vol pour survivre dans ce pays.

Je pense donc qu’il est très souhaitable que votre témoignage soit largement diffusé en France, sur les sites consultés par les WHV, afin que les jeunes candidats au voyage sachent à quoi ils s’exposent. De ce point de vue, je suis heureux que la campagne de presse en France bien involontairement suscitée par mes quelques lignes dans la lettre consulaire de mai, déclenche une vague de témoignages sur les conditions réelles du travail des PVT en Australie. Comme vous le soulignez, le comportement déplacé de certains jeunes Français peut apparaître comme l’arbre qui cache la forêt de situations de détresse réelles, de comportements dictés par le desespoir face aux refus réitérés des employeurs potentiels et, sans doute dans certains cas, des abus de certains employeurs trop heureux de profiter d’une main d’oeuvre perçue comme taillable et corvéable à merci.

Nous avons demandé une réunion entre le ministère des Affaires étrangères et l’Ambassade d’Australie en France afin d’étudier les moyens de mieux informer les candidats au voyage en Australie. Il importe en effet que ceux qui tentent effectivement cette aventure sachent à quoi s’attendre. D’ores et déjà, je vous communique quelques sites qui seront sans doute intéressés à publier votre précieux témoignage :
http://www.liligo.fr/blog-voyage/
http://www.australie-guidebackpackers.com/
http://pvtistes.net/

J’espère que vous comprendrez mieux, après ce message, notre rôle qui est bien sûr, de veiller aux bonnes relations bilatérales franco-australiennes qui peuvent être compromises par de mauvais comportement de certains Français, mais également de ne pas masquer, pour nos compatriotes, les difficultés qu’ils peuvent connaître en Australie.

Bien cordialement,

Eric BErti Consul général de France à Sydney

8 commentaires à Réponse du consul

  1. La Gélinotte, le 30/06/2013 01:30:55 +10:00

    Vous avez été entendu

  2. Flore, le 30/06/2013 01:34:47 +10:00

    Dites donc c’est super qu’il ait répondu. Au moins il semble bien au courant de la situation réelle dans le pays, j’espère que tout ça fera bouger les choses car c’est vrai qu’ici en France les gens croient encore qu’en Australie on peut vivre comme des pachas en tondant quelques pelouses…

  3. Michelle, le 30/06/2013 06:09:38 +10:00

    Déjà un très très grand bravo à Lucie (aidée de Chris je n’en doute pas) pour son courrier très explicite, très clair, très respectueux et superbement bien tourné à l’attention du Consul.
    Comme dans tous les pays, les habitants ne sont pas tous à mettre dans le même sac, partout il y a des bons, des méchants, des courageux, des profiteurs…. si on ajoute chez les quelques moutons noirs l’alcool et « l’herbe », il peut y avoir quelques dérives qui malheureusement peuvent entacher la réputation des autres.
    Bref je suis très fière de vous, et très fière aussi de savoir que le courrier a retenu l’attention du Consul de France en poste à Sydney. J’espère que les remarques de Lucie mettront en garde les futurs candidats au VVT, et que sa lettre va circuler.
    J’ai été très agréablement surprise que la lettre par elle même a fait réagir pas mal de monde qui ont vécu l’expérience ou s’apprête à la vivre. Je ne serais pas étonnée que la réponse ci dessus déclenche elle aussi beaucoup de commentaires.
    Bravo à notre trio, et courage pour la suite de votre voyage. Nous pensons très fort à vous.

  4. Jeanie, le 30/06/2013 16:40:32 +10:00

    C’est super que Monsieur le Consul ait répondu à Lucie, bisous à tous les trois et bonne continuation

  5. Damien, le 01/07/2013 15:58:40 +10:00

    La réponse indique qu’il est conscient du sujet. A voir les actes qui seront pris lors de la réunion, si réunion il y a…
    Enfin l’idée de publier ta lettre sur les trois sites-webs mentionnés est intéressante et permettra de voir si ces sujets sont pris au sérieux par ces médias.
    Damien

  6. Benjamin, le 05/07/2013 01:36:33 +10:00

    Je rentre prochainement en France ou je suis en contact avec mon ancienne école pour y présenter mon experience en Australie . Je ne suis pas dans le domaine de la restauration ou autre mais du batiment , j’ai exclusivement travaillé sur Sydney . Pour nous dans le batiment tout est different comparer à tout les commentaires que j’ai pu lire sur les conditions de travail et pour le trouver , nous avons la chance d’avoir un système d’apprentissage performant , et notre reputation en tant que bon ouvrier nous suis . Cependant cela ne sera pas une raison pour sur estimé l’australie , c’est une pays que j’aime , ou j’y ai vecu une experience genial et connu des personnes geniales aussi , mais il y a son lot de points negatifs comme Les difficultés a trouver du travail , parfois la reputation des francais fais que tu te retrouve dans le meme sac , ECT . Plusieurs personnes de nationalités étrangères mon avouées que j’étais l’un des rares Français qu’ils appréciaient , avec quelques bons amis que je connais qui sont en meme temps que moi en Australie nous avons une règle c’est : le Francais n’est pas un bon ami . Car deja il ne va pas t’aider a t’ameliorer en Anglais , car c’est tracknard il veut toujours faire la fete , et peut etre 90% des français qu’on a pu rencontrer son immature , irrespectueux , voleur , arrogant , … Pour ma part les bon Français que je j’ai connu peuvent se compter sur les doigts d’une main .
    Je vais présenter mon experience en etant realiste et en insistant que l’Australie n’est pas un eldorado et que beaucoup de personnes échouent . Je prépare en ce moment meme un dossier ou je vais y introduire surement la lettre de Lucie pour les sensibiliser , il y a des points ou je suis plus ou moins d’accord avec elle mais c’est tres bien resumer .
    Ma réussite en Australie comme celle de beaucoup de personnes est basé sur un parametre incontrolable que je nomerai la chance , etre la au bon moment et de tomber sur la bonne personne et tant que ca n’arrive pas bah ne pas perdre espoir de rester positif et motivé quoi qu’il arrive .

  7. LERAY, le 16/11/2014 21:40:57 +10:00

    Chère Lucie, j’ai découvert la première fois l’Australie en 1987 et j’en suis tombée amoureuse. A ce moment-là, il n’y avait pas de visa de travail et c’est avec mes petites économies que j’ai pu traverser le pays d’est en ouest pour l’America’s Cup. Les français à cette époque étaient plutôt rares, surtout une fille de 21 ans voyageant seule. Comme vous, j’ai eu affaire à la solidarité des Australiens et à leur gentillesse légendaire. Pas de coups tordus, des coups de main, des petits travaux et un respect mutuel. Le problème ce sont les binge drinkers du vendredi soir, backpackers ou non, de toute nationalité (australiens y compris). J’ai été hébergée moyennant des loyers ridicules et habité à Perth, Melbourne, Sydney avec des australiens uniquement. J’ai évité la communauté française qui à chaque fois que j’ai rencontré un des ses représentants ne m’a pas tiré vers le haut. Depuis, je suis retournée une douzaine de fois dans le pays en touriste mais c’est le seul pays au monde où j’aimerais m’installer. mais pour cela, il faudrait que je vienne en tant que réfugiée politique. !!! Je maîtrise parfaitement la langue de Shakespeare et enseigne l’anglais en France.Le pire souvenir de 1987, c’est lorsqu’à l’Alliance Française, on m’a rit au nez parce que je voulais enseigner le français et je n’avais pas de visa de travail.
    Ah si, pour l’anecdote, on m’a proposée de faire des photos pornographiques à Sydney en me promettant 10 000 dollars, cette blague, j’étais outrée ! Aujourd’hui, c’est la vague asiatique qui remporte la donne compte tenu de leur organisation et de leur solidarité et sérieux. Lorsque l’on pense à l’histoire de l’Australie et de des premiers migrants, qui n’étaient pas des enfants de choeur, Lisez les écrits de Peter Carey, the Rabbit’s proof fence et bien d’autres et vous verrez que le racisme est bien présent dans ce beau pays. Certains australiens sont très durs comme s’ils avaient oublié qu’un jour leurs parents ou grand-parents avaient émigré. Lisez également ce livre « They’re a weird mob » ou les tribulations d’un italien en Australie.
    J’ai eu la chance de rencontrer des acteurs, des chanteurs, dont Paul Kelly, Peter Garrett, Vince Jones et j’en garde toute la poésie. Il serait temps que le consul revoie sa copie quant au statut des jeune travailleurs et pourquoi pas des seniors dont je fais partie. Il n’y aura pas d’invasion, ce que craignent les autorités australiennes mais des compétences mises à disposition et un autre regard qui manque parfois dans des pays qui se ferment à certaines nationalités. Vous avez été très forte de résister de la sorte Lucie et je vous tire mon chapeau. Mons seul fait d’armes en Australie c’est d’avoir avec ma colocataire Meredith Symonds, sauvé le merveilleux Bondi Pavillion en 1987 de l’invasion de Mac Donald’s en distribuant tracts et en discutant avec les gens. elle a été élue un temps au Waverley Council et fourmillait d’idées. Comme quoi, les étrangers ne sont pas tous des voleurs, ou des meurtriers.
    Bien à vous, j’espère que le consul aura eu l’élégance de vous trouver un quelconque job parce qu’avec une lettre pareille, on ne peut rester insensible.
    Cordialement,
    Nathalie Leray